Carnet de voyage
Le globe trotter de Montmelard, originaire de Saint-Vallier, raconte son périple en Norvège ce vendredi à Génelard
Le quotidien de Florian Gomet, c’est l’aventure !
Ce vendredi soir, à 20 h au centre d’interprétation de la ligne de démarcation, de Génelard, Florian Gomet animera une conférence lors de laquelle il racontera sa traversée de la Norvège. Son deuxième voyage en solitaire après l’Autriche. En deux mois, de mi-juin à mi-août derniers, ce jeune homme originaire de Saint-Vallier, bucheron à Montmelard, a mis le cap au Nord et avalé plus de 2 500 km dans des conditions parfois extrêmes.
Ce rendez-vous sera l’occasion pour lui de raconter son périple et de répondre à toutes les questions, mais aussi de faire comprendre sa philosophie de vie : le confort et le quotidien, ce n’est pas pour lui. Trop ennuyeux !
Macon news : Florian, pour quelles raisons avez-vous choisi de partager votre expérience ?
Florian Gomet : Il y a deux raisons. Une première mercantile, il ne faut pas le cacher. Un voyage comme celui en Norvège m’a coûté 5 000 euros. J’ai des sponsors (garage Boyer et Groupama), mais organiser des conférences comme celle-là, me permet des rentrées d’argent supplémentaires (tarif : 2 euros l’entrée). C’est aussi l’occasion de remercier mes partenaires.
L’autre raison est de raconter mon expérience au plus grand nombre. Je me suis aperçu que mon périple en Norvège avait été suivi de très près grâce aux articles parus sur monceau-news notamment. Les gens ont voyagé avec moi pendant quelques mois, mais s’interrogent aussi et veulent en savoir plus sur l’organisation d’un tel voyage et le but de ma démarche. À la base, j’ai une nature plutôt introvertie et je n’éprouve pas ce besoin de parler de moi, mais il y a cette demande et je souhaite y répondre. En Norvège, j’en ai vraiment bavé. J’ai donc envie que les gens entendent ce que j’ai enduré par goût du paysage et du défi physique.
M. N. : Justement quel est donc le but de votre démarche ? Qu’est ce qui vous motive à ce point ?
F. G. : Le quotidien ne me permet pas de m’épanouir. Rester ici, tout le temps, serait comme une petit mort. À une fête de village, je m’ennuie, parce que ce n’est pas mon univers ! Quelqu’un qui peut accepter une vie ici ne peut pas avoir les tripes pour risquer sa vie dans un voyage comme celui-là. Je cherche la difficulté. Si ce n’est pas difficile, ça ne m’intéresse pas. Suivre les chemins de rando, c’est du tourisme, pas de l’aventure. Pour moi, il est important d’être dans la nature et de se confronter à elle sans suivre des balisages. J’aime voir des paysages indemnes, là où personne ne va.
Cette traversée de la Norvège, c’est un défi à tous les sédentaires qui cherchent le confort. Je suis quelqu’un qui ne reste pas en place. Je viens d’ailleurs de passer une semaine de vacances en Lozère et au programme : raquettes, courses à pied, marche, coupage de bois… Ne rien faire n’est pas compatible avec mon caractère.
M. N. : À travers ce genre de conférence quels messages souhaitez vous passer ?
F. G. : Je veux avant tout parler de ma philosophie de vie. Le but n’est pas de convaincre les gens, mais de leur montrer qu’il est possible de faire autre chose de sa vie. Ma philosophie s’appuie beaucoup sur celle de Tolstoï : le malheur des Hommes ne vient pas de l’insuffisance mais de l’excès. En ayant tout au niveau confort, on se prive de la satisfaction d’assouvir ses besoin naturels.
M. N. : Quelle est la question qui revient le plus souvent quand vous parlez de vos voyages ?
F. G. : On me demande souvent ce que je mange ! En Suisse, c’était un peu n’importe quoi ! En prenant quelques notes, j’ai pu transmettre des informations à une diététicienne qui m’a aidé à trouver une alimentation équilibré pour la Norvège. Mais la conclusion c’est que cela ne sert à rien de faire des menus différents tous les jours parce qu’au final, on mange toujours la même chose. En Norvège, j’ai fait confiance à mon corps et à mes goûts. Et d’après les premières analyses, c’était le bon choix ! Au menu : des pâtes, des protéines en poudre, du fromage type gruyère, des fruits secs, des biscuits, de la semoule avec du lait en poudre pour bébé…
Sur deux mois ça va, mais sur une durée plus longue, je pense que c’est plus difficile, il y a un risque de lassitude. Et si on ne se fait pas plaisir en mangeant, lors du repas, on abandonne vite.
M. N. : Parlons donc de la Norvège, vous imaginiez l’aventure aussi difficile ?
F. G. : C’est mon deuxième voyage seul, après l’Autriche. À chaque fois, j’essaie d’aller dans les endroits les plus reculés. Je sais donc que ça ne va pas être de tout repos. En Norvège, si la saison avait été à l’heure, si j’avais eu une météo normale, des chaussures en bon état, les choses auraient été différentes. L’expérience m’a également fait défaut.
M. N. : Si c’était à refaire, vous changeriez quoi ?
F. G. : J’utiliserais plus Internet pour la préparation globale du voyage. J’ai rencontré des marcheurs qui, grâce à Internet, avaient listé des endroits où on pouvait se ravitailler. C’est très important parce que dans le Nord du pays, c’est très difficile de trouver ce que l’on veut ! J’ai été obligé de me renseigner pas mal. L’avantage c’est que ça m’a permis de faire des rencontres. Sur Internet, j’aurais également pu trouver des cartes plus précises de la Norvège, cela m’aurait plus renseigner notamment sur la fin du parcours où je ne savais pas du tout où je mettais les pieds.
J’ai peut être trop misé inconsciemment sur l’aide extérieure.
M. N. : Avez-vous eu peur à certains moments ?
F. G. : À deux reprises, oui. Dans la neige, le froid, les pieds dans l’eau, j’enchaînais 10 à 12 h de marche par jour parce que je ne pouvais pas planter le tente là où je voulais. J’ai également pris une tendinite du genou au talon. Au bout d’une semaine, j’étais dans un état physique lamentable. J’ai été trop gourmand, j’ai trop présumé de mes forces. Et j’ai eu un gros moment de doute me disant que ma bonne étoile m’avait quitté. J’étais vraiment pessimiste. Ça a duré une semaine. L’idée d’abandonner m’est même venue, mais comme un voyage n’est pas facile à organiser (entraînement, organisation, les sponsors qui vous fant confiance), je ne pouvais pas. Je suis donc reparti en mettant chaque jour un pied devant l’autre et j’ai avancé doucement. Et la machine est repartie.
L’autre moment, c’est dans les marais en hors piste. Je n’ai pas eu peur parce que je me suis mis en danger, mais parce que c’était difficile et endurant avec une forte présence de moustiques. J’avais une centaine de piqures sur mon corps, malgré les couches de vêtements que je portais. Je m’enfonçais comme dans de la mousse. Par deux fois, ma jambe est entrée dans la vase. Il faut vraiment tracer son chemin dans la végétation. Sur le moment, c’était le coup de déprime.
M. N. : Et quand on voyage en solitaire, il n’y a forcément des moments où l’on se sent seul ?
F. G. : Jamais dans la nature. Au quotidien oui, je m’ennuie, mais pas quand je voyage. Je rencontre des gens aussi. J’échange, on se paie un café, on est invité…Il y a moins de méfiance en plus que dans les zones urbaines. Dans ces régions reculées, les hommes sont beaucoup plus généreux et n’ont aucun a priori. Ma philosophie, aujourd’hui c’est d’en faire un maximum, je recherche toujours le dépassement de mes limites physiques.
M. N. : Comment vous entrainez vous pour préparer ce genre de périple ?
F. G. : Il faut être actif au quotidien. Après, j’en connais également qui sont partis sans entraînement physique. Sur le parcours, il s’agit davantage d’une question de vitesse et de rendement que de condition physique. Je suis licencié au club de course à pied de Roanne dans lequel je fais plus de la vitesse que de l’endurance. Je m’entraîne également avec mon métier de bucheron.
M. N. : Quel est votre meilleur souvenir en Norvège ?
F. G. : Je dirai que c’est au moment du retour, sur la route pour récupérer mon vélo. Quand j’ai fait du stop ! Une famille m’a embarqué et invité chez elle. C’était le jour de mon anniversaire : ils ont ouvert une bouteille, on a pas mal discuté. J’ai dormi chez elle et le lendemain, on est allé au point le plus au Nord de la Norvège, ils m’ont fait découvrir la faune et la flore locales.
M. N. : Votre prochain défi ?
F. G. : Un réveillon du 31 décembre original ! Je vais faire Montmelard – Lyon en courant ! 120 km, départ à 21 h avec une frontale, une boussole et un sac avec quelques vêtements et un peu de nourriture. Mais ce que je souhaite, c’est me ravitailler en chemin en frappant à la porte des gens. Je devrais arriver à Lyon vers 12 h, manger avec la famille avant de revenir en train ! Je m’ennuie dans tout ce qui est traditionnel donc pour moi ce sera direction le GR7, le GR76, le GR du Pays du Beaujolais Bugey.
M. N. : Plus loin, il y a le Canada aussi…
F. G. : C’est mon prochain grand voyage, 5 000 km de mai à novembre 2014. Je partirai de la cote Atlantique jusqu’à la frontière près de l’Alaska, mais je ne passerai ni par la route du sud, ni par le Nord. Ce sera une traversée en diagonale, avec des lacs, des marais et des montagnes. Je vais commencer par traverser le Québec à vélo, avant d’enchainer avec du canoë et de la marche. Si je n’avance pas suffisamment vite, je passerai l’hiver sur place et je travaillerai. Je partirai d’ici sans rien laisser derrière, j’emmènerai peut être même mon chien.
Je ne me fixe pas de contraintes, ni de barrières. Peut être que je reviendrai, peut être pas ! C’est le bon âge pour tenter cela, et puis je n’ai pas ici d’investissement particulier, de vie de famille. Rien ne me retient. Je ne peux pas ne pas le tenter.
J’aimerais être suivi à 2-3 endroits par un caméraman pour avoir quelques souvenirs vidéos de cette aventure. Si quelqu’un a donc envie de tenter une partie de l’aventure, il peut me contacter sur mon site internet : http://www.cap-au-nord.com
Le budget sera différent, environ 20 000 euros. Si je n’ai que 10 000 euros, je partirai quand même… en prenant plus de risques. Mais je montrerai à ceux qui n’ont pas voulu me soutenir ce que j’ai dans les tripes pour gagner leur confiance.
Propos recueillis par Delphine CRESSON